Notre jeune association RAMES-BTP s’est donnée pour but de

  • Développer et soutenir des actions d’intérêt général à caractère social, environnemental, culturel et éducatif sur le territoire de l’arrondissement de Narbonne, du département de l’Aude, de l’Occitanie.
  • Organiser des actions citoyennes pour alerter sur les enjeux de la résilience face aux crises actuelles (environnementale, économique, sanitaire et sociale)
  • Echanger, animer, organiser des manifestations et lancer des initiatives locales autour des questions d’éco-citoyenneté, d’économie sociale et solidaire
  • Permettre une alternative à la consommation de masse, promouvoir une économie circulaire, une agriculture locale et respectueuse de l’environnement ainsi que la mise en réseau d’idées et de savoir faire écologique
  • Promouvoir et accompagner une profonde transition écologique, sociale et humaine de la société, en favorisant la recherche individuelle et collective et la mise en place d’alternatives innovantes et soutenables
  • Créer du lien entre les personnes physiques ou morales intéressées, allant dans le sens denos objectifs.
  • Veiller aux atteintes à l’environnement.

Elle est la traduction « institutionnelle » d’un collectif qui s’était donné pour nom : Balance

Ton Port la Nouvelle, constitué à la suite de l’enquête publique de 2018 sur le projet d’extension portuaire. Il rassemblait des personnes venant d’horizons divers (scientifiques, politiques, économistes, agriculteurs, ingénieurs, simples citoyens…) très critiques sur ce projet, n’en entrevoyant ni sa pertinence économique ni son dimensionnement. De plus les études environnementales présentaient de nombreux biais faisant craindre des effets

extrêmement néfastes dans les années à venir.

C’est à ces titres que nous avons pris connaissance du présent dossier et formulons un avis.

Comme à l’accoutumé, les délais impartis ne permettent pas une étude approfondie.

L’avis donné par la Mission régionale de l’Environnement nous en donne toutefois quelques clés. En première analyse, nous n’avons pas repéré de contradiction du dossier avec son encadrement réglementaire. Cette assertion n’augure en aucune façon d’un examen approfondi.

Toutefois, nous avons pris connaissance dans le volume 4 (pages 30 à 32/44) d’un avis du conseil portuaire en date du 6 mai 2022. Il a été signé de son président, Didier Codorniou,

par ailleurs président de la SEMOP. Si ce dernier n’a semble-t-il pas participé au vote, ce n’est pas le cas de son directeur général.

Aux termes de l’article 19 des statuts de la SEMOP, celui-ci dispose de larges prérogatives. De ce fait, sommes-nous en présence d’un conflit d’intérêts ?

De manière liminaire, nous constatons que nombre d’éléments présentés dans les

éléments socio-économiques sont datés des années 2010-2015 voire tirés du dossier du débat public de 2013 . Ils ne sont pas actualisés et de ce fait ne peuvent être démonstratifs au vu des évolutions récentes. Pourtant, ce projet économique engageant de très importants financements publics doit en justifier l’emploi, basé sur des perspectives robustes.

La communication de la Région Occitanie comme de la SEMOP porte sur l’avenir de ce port comme celui du traitement des vracs sec et humides ainsi que celui de la transition énergétique. Nous devons rappeler qu’il n’y aura pas d’activité conteneurs pour ne pas concurrencer Sète. Qu’en est-il de ces perspectives ?

Nous relevons p 16/61 du volume 3 :

Loin de nous la volonté de contester ces chiffres mais ils suffisent à montrer la prééminence de l’industrie aéronautique. Dès lors, l’utilité d’un port dédié aux vracs secs et humides ne peut être démontrée. Ceux-ci ne correspondant pas aux trafics liés à cette industrie. Les écrits de la région mentionnent le quai lourd comme pouvant servir aux expéditions/réceptions de colis lourds pour l’aéronautique. Toutefois, devant être occupé par

le montage des éoliennes flottantes jusqu’en 2050, on ne comprend pas très bien l’articulation des deux.

Lors de l’enquête publique de 2018, le maître d’ouvrage avait présenté un plan1 montrant que la construction des éoliennes ne nécessitait pas d’autre infrastructure que le quai « lourd » et le terre plein attenant. Depuis, rien n’est venu infirmer cette présentation, pas même le paragraphe 6.7 du volume 2.3. En conséquence, tous les avis lus dans le registre d’enquête publique et affirmant que cette extension portuaire allait permettre la construction des éoliennes sont nuls et non avenus !

Notre futur port se targue d’être celui de la transition énergétique, reposant sur le

développement de l’éolien flottant et de la filière hydrogène avec la perspective d’en importer jusqu’à 300 000 t/an. Nous avons relevé dans le rapport de la commission d’appel d’offre pour la délégation de service public à la SEMOP2 que dans les perspectives les plus optimistes, l’activité éolienne ne représenterait que 28,85 % du produit d’exploitation du port sur les 40 ans du contrat. Dit autrement, l’activité éolienne ne peut concourir qu’à moins d’un tiers de l’activité totale du port pour atteindre l’équilibre Cela est exprimé dans le tableau ci-dessous :

Activité éolienne 552 770 326 €

Activité commerce 792 496 465 €

Activité domaniale 395 206 555 €

Fournitures aux navires 44 258 690 €

Subventions 131 422 504 €

Total…… 1 916 154 540 €

Le « port de la transition énergétique » n’a donc de viabilité économique que dans le cadre d’un fort développement des vracs secs et humides (alcools, produits pétroliers…). On comprend que l’objectif d’une importation d’hydrocarbure de 816 000 t en 20603 est difficilement tenable dans le contexte de la lutte contre le changement climatique. Par ailleurs, les agro et bio carburants ne pourront s’y substituer à 100 % à moins d’en importer massivement de pays comme le Brésil dont on connait les pratiques climaticides (cultures intensives, déforestation de l’Amazonie…).

L’autre volet du port de la transition énergétique serait le pôle hydrogène. Un projet d’unité de production est en cours d’instruction4. Il sera alimenté en énergie « verte » à partir

de fermes photovoltaïques à implanter sur la zone portuaire. Cela est conforme avec la loi du 30 décembre 2017 qui donne le monopole du raccordement des éoliennes off shore à RTE.

Pourtant, dans son dossier, la SEMOP continue de soutenir5 que ce sera à partir des éoliennes flottantes. Ce détail lui a sans nul doute échappé comme le fait de présenter une cartographie des projets hydrogène (Vol 3, page 26/61) sur laquelle notre port ne figure pas. C’est donc, pour nous sans surprise, que les tribulations du projet MIDCAT6 vont aboutir à conforter la place de Fos sur les importations gazières, Quoi qu’il en soit, ces projets d’importation massive d’hydrogène « vert » posent avec acuité, la question de notre indépendance énergétique.

Au titre des vracs secs, ce sont les mouvements sur les produits agricoles qui attirent notre attention. Page 23/61, du volume 3 du dossier, nous apprenons qu’il est essentiellement envisagé de capter les trafics assurés actuellement par d’autres ports. Déshabiller Pierre pour habiller Paul ? Est-ce souhaitable ? De plus, dans un monde concurrentiel, cela ne peut marcher qu’en disposant d’un avantage comparatif. Celui-ci repose sur des coûts d’acheminement inférieurs entre le producteurs/consommateurs et les ports en question. La deuxième variable est celle des coûts de transports maritimes plus avantageux et la troisième est celle des coûts d’escale (tarifs portuaires, etc).

Lors du débat public de 2013, la Sté Lafarge avait produit un cahier d’acteur qui estimait que l’incidence de l’amortissement des travaux envisagés sur les tarifs portuaires était de 3 €/t « Ce cout représenterait une multiplication par deux des coûts de déchargement par rapports aux autres ports de la région concernant les vracs secs » Bien évidemment, ces chiffres devraient être actualisés mais le dossier d’enquête publique n’apporte aucun éclairage sur ce point.

Plus loin, Lafarge écrit :

Au titre des coûts de transport maritime, l’argument sensément irrécusable est celui de la taille des navires qui présentent des économies d’échelle en augmentant. Dans ce cadre, nous n’aurions bientôt plus de navires répondant aux caractéristiques nautiques actuelles, si ce n’est de « vieux rafiots ». Cette vision simpliste semble de bon sens quand on compare la taille des balancelles qui transportaient des oranges depuis Valencia jusqu’à Port la Nouvelle, dans les années 1950.

Les sites de tracking tels que Vessel Finder ou Marine Traffic permettent de visualiser la taille des bateaux de commerce naviguant en Méditerranée, Force est de constater que course au gigantisme n’est pas aussi absolue que ce que prétendent les promoteurs de l’extension de Port la Nouvelle. Ainsi, l’équation est plus complexe. Dans le cadre du débat public de 2013, la CNDP7 avait organisé un « atelier d’expert » sur les différentes interrogations que soulevait le projet. Le consensus des tiers experts était que le maître d’ouvrage devait faire le choix d’un port qui puisse traiter un trafic « petit moyen », soit un trafic « moyen-grand ». Choix qui n’a jamais été explicité et argumenté de manière décisive. C’est pourtant celui qui guide le dimensionnement du port en fonction des cibles commerciales.

En lisant le contrat entre la région et la SEMOP, nous relevons à l’article V 2§6, une référence explicite à un soutien de la région à la SEMOP pour un dumping tarifaire :

« Si la révision tarifaire, telle qu’approuvée par le Conseil Portuaire, conduit àl’application de tarifs et redevances inférieurs à ceux visés à l’Annexe 13 et que les charges du service concédé ne sont pas ajustées en conséquence, le Concédant verse au Concessionnaire, dans un délai maximum de trente (30) jours à compter de la date de l’approbation du Concédant, une indemnité égale à la différence, si elle est positive, entre les tarifs et redevances visés à l’Annexe 13 pour l’année correspondante et les tarifs et redevances finalement acceptés par le Concédant, multipliée par le trafic constaté sur cette

période. »

Est-il normal que ce soit la collectivité qui endosse ce genre de manipulation ?

Bien évidemment, le dossier d’enquête publique n’en dit mot.

Pour revenir aux trafics des vracs secs, la production de blé dur dans le Lauragais est

souvent citée comme source de trafics de cette céréale vers l’Italie et le Maghreb. C’est même

la fonction « historique » de notre port qui a pu en voir passer 600 000 t/an dans ses

terminaux. Dès 2012, la Confédération Paysanne alertait sur les perspectives de baisse de la

production et corrélativement de nos exportations. Sur son site internet8, la SEMOP annonce

le traitement de 149 970 t de céréales en 2021. C’est fort peu comparé à un passé récent mais

largement supérieur à des chiffres communiqués par le service des douanes.

Les ambitions affichées page 33/61, de capter des trafics de blé tendres sont

incompatibles avec la stratégie portuaire régionale qui place la complémentarité des ports en

objectif majeur. En effet, le port de Sète dispose d’un terminal céréalier dont l’opérateur est le

même qu’à Port la Nouvelle. La répartition entre les deux entités est : blé tendre à Sète et blé

dur à Port la Nouvelle

L’autre matière « agricole » traitée comme vrac sec et mis en avant dans les écrits de la

région comme de la SEMOP, sont les engrais de synthèse (ou azotés), parfois rebaptisés

« manufacturés » pour paraître plus présentables. Dans le même temps, la Région Occitanie

fait la promotion de l’agroécologie. Celle-ci est incompatible avec l’utilisation de ces intrants,

polluants atmosphériques, polluants aquatiques et climaticides.

La forte diminution de leur utilisation, si ce n’est l’abandon, est demandé par les

scientifiques du GIEC, par des associations environnementalistes on même un essayiste

comme Jean Marc Jancovici9. Dans ces conditions, quel est l’avenir à moyen terme des

importations d’engrais azotés.

Nous jugeons depuis longtemps que ce projet d’extension portuaire souffre d’un

manque de modèle économique pertinent. Dans ce sens, les demandes de complément de la

part de la MRAE (volume 7 page 7/44) nous paraissent justifiées. Quant aux réponses de la

SEMOP (page 13/44), elles ne sont qu’un aveu de cette faiblesse en refusant véhémentement

de répondre accusant les services de dériver « implicitement sur la pertinence et un jugement

d’opportunité du projet (…) »

Pour en finir avec les éléments socioéconomiques, page 47 du volume 3, le montant des

travaux de la phase 2 est évalué à 117 M€ hors taxes. Ils seraient financés par la région, au

moyen d’une subvention publique de 39,8 M€. Le pacte d’actionnaire liant les parties de la

SEMOP (Région, consortium Nouvela, tiers investisseur) évoque une augmentation de

capital, « à horizon 2027 » par un apport en numéraire de 15 859 831 € de la part de la région,

sur un total de 45 870 092 €. Les deux sont-ils cumulatifs ?

L’annexe 8 au contrat de concession, à propos du financement de la phase 2, assure :

« Pour assurer la bancabilité de la phase 2 étape B et pour minimiser les subventions d’investissement

éventuelles pour cette phase, la SEMOP établira un fond d’investissement (…) qui sera alimenté

jusqu’à 30M€ à travers le surplus de dividendes (…) »

Avant le lancement de l’opération phase 2, le concessionnaire doit faire le point avec le concédant sur l’état de la trésorerie pour éventuellement minimiser la subvention publique

Nous supposons qu’une grande partie des investissements de la SEMOP vont être financés par l’investissement. La région est garante de ces emprunts à hauteur de 34 %.

S’agissant de fonds publics, les citoyens sont en droit d’exiger plus de clarté sur les

modalités de financement ainsi qu’une évaluation plus stricte de l’incidence sur les finances publiques. Nous ne sommes pas dans le « quoi qu’il en coute ».

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